Vincent Peillon : Pourquoi le PS est inaudible ...

Publié le par désirs d'avenir Somme 80

 
 

LPSOui à la réforme... mais pas celle-là, estime le député européen.

Le PS est inaudible depuis le début des grèves. Pourquoi ?

Notre position est pourtant claire. Nous sommes favorables à un alignement de la durée de cotisation des régimes spéciaux sur le régime général, mais dans le cadre d'une réforme des retraites qui garantisse deux objectifs : l'efficacité économique, pour résoudre le problème du financement; et la justice, pour arrêter l'érosion des petites pensions et prendre en compte la pénibilité du travail. Or le projet du gouvernement n'y répond pas. Les discussions sur la pénibilité n'ont pas avancé d'un iota depuis cinq ans. Quant aux petites retraites, elles n'augmenteront que de 1,1% en 2008, bien moins que l'inflation, alors que Nicolas Sarkozy avait promis de les augmenter de 25% pendant la campagne !

Vous allez vite en besogne ! La réforme globale est prévue pour 2008...

Les régimes spéciaux ne peuvent pas être détachés du reste. Ce n'est pas parce que le gouvernement choisit de saucissonner les problèmes pour les monter en épingle et faire diversion que l'on devrait s'interdire de dégager une vision d'ensemble ! Alors d'accord pour parler d'équité, mais mettons tout sur la table : les régimes spéciaux des transports publics, mais aussi les 6 milliards d'euros qui abondent chaque année, par exemple ceux des agriculteurs, des commerçants et des artisans, ou les autres sources possibles de financement, les parachutes dorés, les stock-options, ect.

Ce n'est pas une façon pour le PS de noyer le poisson une nouvelle fois ?

C'est quand même curieux comme raisonnement ! Nous disons : il faut une réforme. Vous nous dites : la réforme de la droite ne vous convient pas, donc vous êtes contre la réforme... Ce petit jeu qui consiste à répéter que le PS ne fait rien ou ne décide rien, même quand il tranche, devient malsain. Et malhonnête. J'ai écouté Xavier Bertrand le week-end dernier expliquer que le PS n'avait jamais conduit de réforme depuis dix ans ! Comme si, de 1997 à 2002, on n'avait pas fait la couverture maladie universelle (CMU), l'allocation personnalisée d'autonomie (APA), les 35 heures, la parité...

Oui, mais pas les retraites, justement...

Et alors ? Parce que nous ne l'avons pas fait, on devrait accepter, des années plus tard, que la seule réforme possible soit celle que tente d'imposer la droite ? En 2002, les comptes de la protection sociale étaient équilibrés alors que nous avions créé de nouveaux droits avec la CMU ou l'APA. Cela veut bien dire qu'il existe, à gauche, une conception de la réforme qui reste synonyme de progrès, et pas forcément de régression.

Tout va pour le mieux au PS alors ?

Non, évidemment. Nous souffrons d'une absence de clarté sur notre projet. L'autre souci, c'est notre capacité à vivre ensemble. Certains dirigeants socialistes s'exonèrent des décisions collectives. Or notre tradition de pluralisme ne peut tenir que si tout le monde respecte les décisions une fois qu'elles ont été prises. Ce qui suppose évidemment une forme d'autorité.

François Hollande en est-il capable ?

En confirmant qu'il partirait mais en repoussant le prochain congrès dans un an, il ne s'est pas facilité la tâche ni n'a simplifié celle des socialistes. Ce qu'il a fait depuis six mois est très insuffisant. Et c'est en grande partie ce qui explique notre difficulté à être audible. François Hollande a pourtant un grand rôle à jouer s'il veut que son bilan ressemble à quelque chose : engager la rénovation, mener la campagne pour les municipales et reconstruire de la confiance.

Cela suppose que tout le monde joue le jeu, non ?

On a déjà perdu cinq ans, n'en perdons pas cinq de plus. Le risque existe que les petits arrangements se poursuivent. Quand je vois le strausskahnien Jean-Christophe Cambadélis prendre langue avec les fabiusiens pour des raisons tactiques, chaperonnés par Arnaud Montebourg, alors que sur le fond tant de choses les opposent, je me dis que c'est exactement ce qu'il ne faut pas faire. C'est ce qu'il reproche à Hollande, mais sans Hollande... Il faut du courage et de la cohérence intellectuelle pour reconstruire une ambition collective.

La refondation risque de durer longtemps...

C'est facile de moquer la refondation, mais on n'en parlerait pas autant si on l'avait faite ! Notre prochain congrès doit absolument définir le socialisme du XXIe siècle, et donc trancher sur le fond notre orientation. Mais il faudra aller plus loin encore. Les électeurs de gauche sont atterrés devant l'inertie, le repli, l'agressivité et la paresse des appareils censés les représenter. Nous ne pouvons plus considérer que le Parti communiste tel qu'il est a une vocation historique. C'est fini ! De la même façon, il n'y a plus de place pour une écologie réservée aux Verts. Proposons-leur, ainsi qu'aux chevènementistes et aux radicaux, des assises de la gauche et des progressistes. Pas pour concocter un énième comité dont le seul but soit de répartir les places au conseil général de Seine-Saint-Denis ! Mais pour construire ensemble un nouveau parti avec un nouveau projet, en y associant les citoyens, les intellectuels, les syndicats ou encore les grandes associations qui le souhaiteront. La gauche française doit sortir de ses crispations et se remettre en mouvement.

Matthieu Croissandeau / Le Nouvel Observateur

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C
Tout à fait exact !C'est vrai, il y a des différences, des personnalités différentes, des ambitions différentes,des passés et des futurs probablement différents.C'est vrai qu'il n'est pas toujours facile de suivre les méandres de chacun. Et nous savons combien est complexe la personnalité de chacun. Mais aujourd'hui, quelques mois étant passés, il faut reprendre le chemin de l'unité, du rassemblement, des principes partagés et oublier certains écarts.Le chemin est bien devant nous et nous avons besoin de toutes les bonnes volontés. Nous ne sommes pas des clônes., heureusement.Allons ensemble de l'avant. Nous ne devons plus décevoir...Prenons le meilleur de nous-mêmes et des autres.
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R
Désolé mais l'analyse est clair et l'argumentaire précis.N'oublions pas le rassemblement de la gauche comprenant Chévènement, le PC, Fabius, Cambadélis, Dray, radicaux de gauche, Hollande, Peillon, Montebourg, Valls, Moscovici, Royal bien entendu, etc...Privilégions les échanges, les confrontations d'idées plutôt que les anathèmes.Qu'on le veuille ou non, ce qui nous rassemble est plus grand que ce qui nous sépare.
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A
Si je comprends bien, parler avec le PC, Chévènement et les radicaux, c'est bien et souhaitable.Parler avec Montebourg, Cambadélis ou Hollande, c'est honteux et scandaleux."Il faut du courage et de la cohérence intellectuelle pour reconstruire une ambition collective".... Tu commences quand Vincent ? 
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